rmi la pluie de décrets que Donald Trump a signée dès le premier jour de son investiture comme 47e président des Etats-Unis figure l’accord de Paris sur le climat. Alors que Los Angeles brûle et que la Floride subit des ouragans de plus en plus violents, les Etats-Unis se retirent donc de cet accord signé en 2015. La lutte contre les effets du réchauffement climatique est-elle dès lors perdue ?
La tentation contagieuse ?
« Le point positif, c’est au moins sa franchise« , estime Xavier Fettweis, climatologue à l’Université de Liège. « Il avait annoncé qu’il allait relancer l’extraction de nouveau gaz de schiste et de pétrole, c’est mieux que certains pays qui disent qu’ils réduisent leurs émissions de dioxyde de carbone mais ne font rien ou carrément l’inverse ».
La décision de Donald Trump aurait comme conséquence d’entraîner 4 milliards de tonnes d’équivalent CO2 supplémentaires d’ici à 2030, par rapport aux politiques menées sous l’administration Biden. Cela représente les émissions annuelles de l’Europe et du Japon.
« Avec la sortie des Etats-Unis de l’accord de Paris, d’autres pays pourraient suivre et ça va retarder de quatre ans tous les efforts », explique Xavier Fettweis. La Chine et l’Inde, grands pollueurs, pourraient en effet être tentés.
Une perte d’influence
« L’accord de Paris demeure le meilleur espoir de l’humanité face aux changements climatiques« , a affirmé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, depuis le Forum économique mondial à Davos. « L’Europe gardera le cap et continuera de coopérer avec toutes les nations qui ont la volonté de protéger la nature et d’arrêter le réchauffement planétaire. »
« Les Etats-Unis ne sont qu’une des parties de l’accord de Paris« , tempère Jean-Pascal Van Ypersele, climatologue et professeur honoraire de l’UCL, « il y en a presque 190 autres« . Même si s’ils sont le deuxième plus grand pollueur, après la Chine, et le premier pollueur historique ? « D’une certaine manière, ils vont perdre de l’influence, parce que je suis sûr que les délégués américains vont continuer à participer aux COP et aux réunions mais ils porteront un badge d’observateur ».
« Ils ne pourront plus participer au cœur des négociations et avoir la même influence, alors que certaines des décisions qui vont être prises lors de ces COP vont influencer, que cela plaise ou non à Washington », estime Jean-Pascal Van Ypersele.
Temps et argent perdus
L’année 2024 est la plus chaude jamais enregistrée. Dans tous les cas, ce retrait américain retarde encore de 4 ans les efforts pour limiter le réchauffement climatique. L’accord de Paris prévoit de limiter à 2 degrés maximum la hausse des températures. « On a atteint 1.6 degrés cette année, le réchauffement climatique s’emballe, c’est évident. Et si on veut atteindre les 2 degrés maximum à la fin du siècle, il est clair qu’il faut diminuer nos émissions avant 2030« ,explique Xavier Fettweis (ULiège).
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Comment sait-on que le climat actuel est le plus chaud depuis au moins 120.000 ans ?
« Les États-Unis connaissent de près le coût des impacts des changements climatiques« , rappelle Jean-Pascal Van Ypersele (UCLouvain). « On l’a vu tout récemment en Californie et en Floride, des régions entières sont menacées par des tempêtes et ouragans de plus en plus violents, des sécheresses et des incendies incontrôlables. Il y a toute une série de zones que les compagnies d’assurances ne veulent plus assurer ou alors à des prix exorbitants ».
Pour le climatologue de l’UCLouvain, « les États-Unis se tirent d’une certaine manière une balle dans le pied en refusant de participer aux efforts internationaux« . Pour son confrère de l’ULiège, « économiquement parlant, à l’échelle de 10 à 15 ans, tous les économistes sont d’accord pour dire que ça va coûter beaucoup plus cher de ne rien faire que d’agir dès maintenant« .
La transition déjà en route
La transition énergétique est pourtant déjà en route aux Etats-Unis. « Beaucoup d’États américains et de villes américaines gérées par des démocrates ont continué, à leur niveau, dans la voie de la protection du climat, l’action climatique, la réduction des émissions de gaz à effet de serre » raconte Jean-Pascal Van Ypersele. Même le Texas, un État pétrolier, très républicain et proche de Donald Trump, installe des énergies renouvelables. « Beaucoup de citoyens et d’entreprises se sont rendu compte que oui, bien sûr, il y a du pétrole dans le sol, mais surtout que le soleil est gratuit et que les panneaux photovoltaïques sont de moins en moins chers« .